La Sorcellerie en Picardie

la sorcellerie en 1900

Je vais vous parler de la Sorcellerie car après la médecine, souvent trop chère pour nos paysans et dont ils se méfient encore beaucoup, après l’aide du curé et de ses saints, on avait recours à la sorcellerie bien connue et accessible à tous. En Picardie, tout respire la sorcellerie, tout le monde est un peu sorcier.

Tout phénomène inexplicable sera baptisé sorcellerie. Dans chaque village, il y a le spécialiste, celui qui sait, qui a des connaissances, de l’intuition. Celui qui connait, comprend et peut toujours agir. Ce sera une femme dans 70% des cas ou un homme, peu importe. On le craint, il est indispensable à la vie de tous les jours.

On y a très souvent recours.

Il y aura toujours une recette pour vous. La sorcellerie, il y en a deux styles :

La magie blanche ou douce

La magie blanche : c’est la magie qui aide les autres, en bien, magie la plus courante chez nous. Nous avons dans ce groupe le guérisseur, le rebouteux, la sage-femme et le berger connu pour ses nombreux dons.

Vous les connaissez tous, ils ont toujours existé, et existent encore de nos jours. Ce sont des personnages prés de la nature qui connaissent bien la faune et la flore et s’en servent à bon escient. De plus ils ont toujours quelques dictons et recettes bien appliqués pour toutes sortes de situations possibles et qu’ils se transmettent de génération en génération.

Par exemple : à Lucheux il faut passer sous deux arbres enlacés pour avoir un mariage durable.

Les abeilles du Vimeu piquent les gens qui jurent

Nous avons une sorcellerie blanche de genre différent avec les êtres fantastiques comme les fées, les animaux présages. Il y a aussi des lieux spécialisés pour réaliser tel ou tel désir comme les arbres magiques d’inspiration druidique. Qui ne connait les pierres ensorcelées telle la pierre de Vanel à Fontaine-sur-Somme qui fût christianisée un beau jour parce-que trop adorée. Enfin il y a les sources aux eaux que l’on dit vertueuses pour les maux de dents ou les chagrins d’amour.

Et le folklore du ciel qui est important à connaitre comme ‘planter les haricots” (Airaines 1893) au déclin de la lune pour qu’ils n’allongent pas.

Tout cela fait vivre l’espoir du paysan.

La magie noire ou diabolique.

Pour ce qui est de la magie noire, c’est beaucoup plus impressionnant.

En général, celui qui la pratique est un être aigri, à l’esprit retors. C’est un sorcier qui aime dominer et se faire craindre, qui a l’amour du gain facile. Il porte en lui la méchanceté à l’état pur. C’est pourquoi, il prend pour les simples, l’aspect du diable :

-de l’affreux diable à queue, laid, poilu, cornu

-où du diable à monsieur ganté, beaux habits très correct que les dames apprécient.

On croit qu’il peut prendre l’aspect du loup garou comme la bête Cantelaine qui hante le Ponthieu. || peut aussi prendre l’aspect du croquemitaine qui effraye les enfants (on l’appelle alors « grand-mère à porette”).

Il sera envoûteur en faisant des figurines de glaise qu’il fera souffrir en piquant ou brûlant l’effigie. I! sera devin. Il se servira de “recettes” qu’il apprend lors des sabbats. Le sabbat, c’est la grande réunion des sorciers. Il s’y passe toujours de curieuses choses. Le décor c’est la parodie de l’église du pouvoir en place. Tout est mystères, obscurité, feux follets, voluptés interdites. Il y a des sabbats un peu partout. On en trouve trace à Domart, au bois Copillot. Il y a le gobelet du sabbat à Canaples et les ronds de sorcières où l’herbe est toujours différente.

Au début du XXe, à Montrelet, une fille de famille de sorcier ne trouvait pas à se marier.

Je vais vous raconter comment cela devait se passer : les sorciers et les sorcières nus devant l’âtre s’enduisaient d’onguents graisseux de sang de chauve-souris, suie, râpure de cloches. On dit qu’ils sont venus avec un balai dont les fibres ne se croisent pas à cause du symbole de la croix. Les participants tiennent une chandelle noire. Sur l’autel est allongée une femme. L’officient « Maitre Léonard” est habillé de noir et confesse tout haut les vices et turpitudes de chacun. Les applaudis décident quels nouveaux sorts appliquer prochainement. Puis on présente les aspirants sorciers qui doivent cracher sur le crucifix, s’asseoir en lui tournant le dos. On récite les 10 commandements diaboliques. On dit la messe avec une hostie noire que l’on piétine avec rage. Puis c’est l’orgie. C’est une débauche gastronomique où le sel manque car il est d’essence divine. C’est un repas aussi abominable avec serpents,crapauds etc. le tout arrosé de liqueur à la belladone et de chanvre vert qui sont des aphrodisiaques.Ensuite se sont les douces lascives .

Au chant du coq tout disparait .

Heureusement il existe des contres sorts

Par exemple, on peint des moustaches de couleurs vives à l’avant des barques pour éloigner les mauvais esprits.

Mais sur l’eau douce, on peint des yeux ronds.

A Bettencourt, on porte des amulettes contre le tirage au sort pour le Service.

Enfin on tue le chat. Le chat est détesté par les paysans, surtout s’il est noir.

Comme il vit la nuit, on l’identifie au diable.

On tue un chat noir pour fêter la fin d’un grand travail (comme la moisson) et on le hisse au-dessus de la dernière charretée.

Le premier dimanche de carême, on en fait mourir plusieurs, les installant dans des paniers au pied d’un grand mât, puis on allume des fagots disposés tout autour.

Les pauvres chats grimpent au mât et tombent dans les flammes, étouffés par la fumée.

La foule est ravie. C’est la fête, son exutoire pour tous les malheurs qu’elle a eus ou va avoir.

Elle tue ainsi ses craintes, ses superstitions.

Voilà pour ce qui est de la sorcellerie, blanche ou noire, chez nous en 1900.

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